sepik-papouasie-nouvelle-guinee-exposition-musee-quai-branly-copyright-maeva-destombes_MG_1550Figure féminine en bois, fibres, cônes, pigment ocre rouge. Attribué à la région du bas Sepik ou du Ramu. Date d’acquisition et collecteur inconnus. Paris, musée du quai Branly. Une femme, ancêtre fondatrice, est représentée en position accroupie. La couleur rouge (issue de l’ocre ou de graines) fait référence aux puissances surnaturelles.

Le Musée du Quai Branly présente du 27 octobre 2015 au 31 janvier 2016, « Sepik, Arts de Papouasie-Nouvelle-Guinée » une exposition réunissant plus de 230 objets mettant en lumière la richesse culturelle des populations méconnues de la région du Sepik.

UNE EXPOSITION RARE ET EXCEPTIONNELLE

Dans sa vitrine de velours rouge, elle nous toise du regard. Avec ses petits yeux de nacre, elle nous transperce. Sur l’affiche, elle nous semble gigantesque. Pourtant, elle ne fait que quelques centimètres. Elle, c’est cette petite statuette qui résume à elle seule la profondeur de l’Art Sepik. Fascinante, intrigante, hypnotisante, elle semble lire au plus profond de notre âme, alors que finalement c’est nous qui devrions percer ses secrets… L’exposition Sepik, d’abord présentée au Martin-Gropius-Bau de Berlin et au Rietberg Museum de Zürich, deux musées possédant d’incroyables collections de Papouasie-Nouvelle-Guinée, met en relief, avec plus de 230 sculptures issues de 18 musées européens, la diversité des rapports entre les peuples du Nord de la Papouasie et le fleuve Sepik. La dernière exposition de cette ampleur date de… 1984 à Bâle et à Washington !

sepik-papouasie-nouvelle-guinee-exposition-musee-quai-branly-copyright-maeva-destombes_MG_1494Tambour à fente en bois, fibres, pigment ocre rouge. Attribué à l’île de Kairiru. Don du prince Roland Bonaparte au musée d’Ethnographie du Trocadéro en 1888. Paris, musée du quai Branly. La silhouette d’une figure accroupie révèle un style originaire de la région de Berlinhafen (Aitape).

L’IMPORTANCE DU FLEUVE SEPIK DANS LES POPULATIONS

Le fleuve Sepik est d’une importance capitale dans l’histoire de la Papouasie-Nouvelle-Guinée puisque la région qu’il nourrit de ses crues saisonnières abrite des populations depuis le premier millénaire avant notre ère. Long de 1126km, ce qui en fait le plus long du pays, il rythme la vie et les rites de ceux qui habitent sur ses rives. Nourricier, le fleuve Sepik est une importante source de richesse et un moyen de transport essentiel dans la région qui abrite une immense diversité de cultures et de langues (Bahinemo, iatmul, ramu, kwoma, yuat, chambri, ngala, karawari…). Les régions du Moyen et du Bas Sepik comptent à elles seules 90 langues différentes.

sepik-papouasie-nouvelle-guinee-exposition-musee-quai-branly-copyright-maeva-destombes_MG_1478Pirogue à balancier en bois et en fibres.

Embarquement immédiat avec les monumentales pirogues qui ouvrent l’exposition. Des images projetées en arrière fond invitent chaque visiteur sur le fleuve. Les salles en enfilade peuvent représenter les villages rencontrés tout au long d’une navigation sur le fleuve et ses affluents et évoquent – selon la volonté des commissaires de l’exposition – un village traditionnel, permettant de découvrir et comprendre les différents espaces qui le composent et les figures importantes des sociétés Sepik : les femmes, les hommes et les initiés. Progressivement apparaît la figure la plus importante : les ancêtres fondateurs souvent représentés sous la forme de crocodiles.

sepik-papouasie-nouvelle-guinee-exposition-musee-quai-branly-copyright-maeva-destombes_MG_1573Détail d’une ceinture d’initié en fibres, pigment noir. Attribué à la région de l’embouchure du Ramu. Don de C. Wahnes, 1899. Dresde, Museum für Völkerkunde.

L’ORGANISATION TRÈS STRUCTURÉE DES VILLAGES

Les maisons des hommes sont les principaux lieux de culte qui peuvent se déployer à l’abri du regard des femmes. Ces maisons foisonnent de sculptures et de peintures. Pas une surface libre à l’intérieur ou à l’extérieur ! De nombreux objets décorés y trouvent leur place. Tambours à fente, sculptures, sagaies, flûtes, planches malu, masques de façade investissent les maisons des hommes ou familiales tandis que plats en terre cuite, pots, jarres, sacs, paniers sont plutôt visibles dans les maisons des femmes. Les crochets qui servent à suspendre la nourriture ou les biens précieux sont omniprésents dans les villages du fleuve. Autres objets symboliques : les parures qui jouent un grand rôle dans chaque société et indique le statut de ceux qui les portent. Le monde des femmes est séparé de celui des hommes. Dans les maisons des femmes, les visiteurs peuvent découvrir le rôle économique et nourricier de ces dernières. Ce sont elles qui fabriquent une grande partie des biens échangés : vanneries, sacs en fibres, masses, poteries… Même s’ils ne sont pas personnifiés, les ancêtres fondateurs en constante métamorphose se manifestent sous de multiples formes tout au long de cette exposition.

sepik-papouasie-nouvelle-guinee-exposition-musee-quai-branly-copyright-maeva-destombes_MG_1673Tête tirant la langue Yauntja-Su pour Hamayo-Kwar-Sukwiya en terre. Groupe linguistique kwoma, village de Orumbantj. Collecté par Dadi Wirz en 1955. Bâle, Museum der Kulturen. Autrefois, avant l’apparition des humains, le monde kwoma était peuplé d’ancêtres mais aussi d’êtres comme les génies tutélaires des ignames. Leurs traits étaient très particuliers, comme le montre cette tête originaire du village d’Orumbantj, qui portait le nom Yauntjasu.

LES OBJETS NOUS MURMURENT…

L’Art Sepik, aussi coloré que la région est grise et terne, s’inspire de toutes les formes animales et végétales. L’univers symbolique de cet art fascina les artistes et les surréalistes notamment André Breton et Paul Éluard. Ce qui fascine également c’est la richesse des matériaux utilisés pour illustrer cet art : bois, fibres, pigments, terre, cheveux, rotins, os, cauris, perles européennes, pierres, coquillages, plumes…
Comme elle avait commencé, cette balade sur le fleuve Sepik se termine à bord d’une pirogue sculptée. Une poterie représentant sans nul doute un ancêtre nous interpelle. En nous tirant la langue est-elle en train de nous dire que même si les peuples du fleuve Sepik nous ont révélé quelques secrets, de nombreux autres restent inaccessibles et à jamais enfouis dans l’histoire qui berce les rives de cette région depuis des millénaires ?

sepik-papouasie-nouvelle-guinee-exposition-musee-quai-branly-copyright-maeva-destombes_MG_1597Bouchon de flûte en bois, fibres, plumes de casoar, dents, cauris, nassa, écaille de tortue, pigments blanc et ocre rouge. Attribué au groupe linguistique biwat, village d’origine inconnu. Acquis en 1976 ; anciennes collections. Arthur Speyer, Lorenz Eckert, Patricia Withofs, Ernst Beyeler Bâle, Museum der Kulturen.

INFORMATIONS PRATIQUES

Sepik, Arts de Papouasie-Nouvelle-Guinée du 27 octobre 2015 au 31 janvier 2016. Musée du quai Branly, Galerie Jardin, 37 Quai Branly, 75007 Paris. Tél. : 01 56 61 70 00. Horaires : mardi, mercredi et dimanche de 11h à 19h, ouverture de la billetterie à 9h30 (dimanche à 10h30), fermeture à 18h ; jeudi, vendredi et samedi de 11h à 21h, ouverture de la billetterie à 9h30, fermeture à 20h. Fermeture hebdomadaire le lundi. Tarifs plein 9€, tarif réduit 7€. www.quaibranly.fr.

Copyright des photos : Maeva Destombes. Toute reproduction est strictement interdite. Article L.335-2 du Code de la propriété intellectuelle.