Le 8 février 2002, une cinquantaine d’étudiants ont assisté, au foyer des étudiants à Paris, à une conférence sur les Marquises et sur le tatouage aux îles Marquises. Une conférence ayant servi à une mise en garde, en particulier en ce qui concerne la protection de la nature.

LES MARQUISES, DES ÎLES FORMÉES IL Y A 6,7 MILLIONS D’ANNÉES

La conférence donnée par Marie-Noëlle Ottino, docteur en préhistoire, ethnologue et anthropologue, et membre associé du laboratoire 275 du CNRS, établissait un bref récapitulatif (bref car le propos est si vaste que 2 heures ne peuvent suffire) de l’histoire des marquises, de son peuplement jusqu’à nos jours. À environ 6000 km de l’Amérique du Sud, 1500 km de Tahiti et 3000 km de l’île de Pâques, les Marquises sont des îles du Pacifique ayant été peuplées le plus tardivement. Nées d’un phénomène volcanique récent (environ 6,7 millions d’années selon Marie-Noëlle Ottino, 6 à 8 millions d’années d’existence selon Alain Bonneville, chercheur à Jussieu), ces îles (Nuku Hiva par exemple) ont la particularité d’avoir peu de baies, peu de plaines côtières et de hautes falaises si caractéristiques. Ces îles sont composées d’une succession de vallées, lesquelles appartenaient à un clan. Malgré des échanges fréquents, il existait une rivalité certaine entre les différents clans. Un système d’organisation avait été institué, et la redistribution des récoltes se faisait par le biais du chef.

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DE NOMBREUSES ESPÈCES ENDÉMIQUES

L’arbre à pain avait une importance considérable. Les Marquises possèdent une multitude de variété de cet arbre, ses habitants en avaient trouvé de nombreuses utilisations. La pâte du fruit servait par exemple de colle, et pouvait donc être utilisée pour coller le tapa. Mais comment s’est donc produit le processus de végétation de ces îles et son peuplement animaliers ? On dénombre trois types de processus : la voie naturelle, l’endémisme et les apports faits par l’homme. Par le processus par voie naturelle, on évoque un système de peuplement par le vent (4% de la flore – parmi lesquelles on peut citer les fougères – aurait été apportée d’Amérique, d’Asie du Sud Est grâce aux vents normaux mais aussi aux cyclones et aux ouragans), par les courants marins (des petits animaux ont pu atteindre les Marquises en dérivant sur des objets flottants, des fruits comme les noix de coco ou les fruits de Pandanus ont pu atteindre les rivages), par les oiseaux (grâce à des graines contenues dans leurs estomacs – Niconia ou Noni – ou à des graines s’accrochant à leurs plumages). Jusqu’à récemment, on suppose que 80% de la faune des Marquises étaient endémiques, parmi ce taux il y avait 55% des insectes et 12% des mollusques. Que reste-t-il de ces espèces endémiques ? Les hommes ont participé à la disparition de nombreuses espèces et en particulier à cause de l’introduction d’autres espèces apparemment anodines comme le chien.

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L’ART INCONTOURNABLE DU TATOUAGE AUX MARQUISES

L’arrivée des Polynésiens aux îles Marquises a longtemps été un mystère. D’après les dernières recherches scientifiques, on estimerait cette arrivée à 150 avant J.C.. La langue marquisienne est par exemple la plus ancienne du triangle polynésien. Mais quoi que l’on veuille affirmer, le peuplement du Pacifique et en particulier des Marquises reste un grand mystère !
La deuxième partie de la conférence traitait des Marquisiens des temps anciens et en particulier de leurs traditions, leurs coutumes et leurs cérémonies. On y apprend par exemple que les tapas de cette époque étaient peu décorés, ils étaient teintés sauf à de très rares exceptions. Pour le tatouage, on organisait un conseil des anciens pour savoir si telle ou telle personne y avait le droit. La lecture des tatouages pouvait se faire de différences façons, et les niveaux de compréhensions possibles étaient multiples. Aux îles marquises les motifs des tatouages ressemblaient à de la dentelle, puis ont évolué vers les aplats noirs que l’on connaît plus.

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Motifs dérivés de la face de tiki.

L’ÉVOLUTION DES TATOUAGES MARQUISIENS

Mais pourquoi ces tatouages ont-ils évolués dans ce sens alors que d’après certains scientifiques, les sculptures faites sur les casses-têtes, par exemple, ont évolué de façon différente voire de façon inverse (des motifs épurés avant l’arrivée des missionnaires à des motifs complexes après cette arrivée) ? Ces aplats noirs se seraient-ils développés afin de cacher ce qui à l’époque avait un lien avec des pratiques païennes ? À l’époque on se tatouait entre les périodes de formation. On commençait par tatouer le fils du chef (en commençant par les jambes pour finir par la tête) pour terminer par ses compagnons de la vie courante. Les fêtes de fins de tatouage concordaient avec les fêtes qui honoraient les périodes de récoltes. Alors que les hommes avaient des motifs plutôt ronds, les femmes se faisaient tatouer des motifs en demi-lunes. Le premier né d’une fratrie recevait les tatouages de son hérédité. Parfois les femmes pouvaient être très tatouées si elles appartenaient à un haut rang social. Le tatouage était de toutes façons un devoir pour être intégré à un groupe.
La conférence aborda également la symbolique des tikis mais aussi l’évolution de l’habitat. Au fil du temps, celui-ci s’est diversifié. Les habitants de ces îles se sont peu à peu installés à l’intérieur des vallées.
Conférence au sujet vaste et complexe donc mais suivie attentivement par les étudiants polynésiens. Lesquels ont prouvé leur envie d’approfondir leurs connaissances sur une culture qui leur est si proche et tout à la fois si méconnue eux-mêmes.

Par Maeva Destombes

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Scène réaliste construite en motifs schématisés.