Le 28 février dernier, Jovoy Paris présentait toutes ses nouveautés, parfums et marques d’auteur. Pour casser les habitudes, ce n’est pas à la boutique que se sont rendus les perfumistas avertis mais sur une péniche amarrée sur les bords de Seine. Au programme, de jolies découvertes olfactives, de nouvelles marques dont les philosophies riment avec éthique, durabilité et équité.

L’ORCHESTRE PARFUM, QUAND LA MUSIQUE INSPIRE LE PARFUM

Le parfum intimement lié à la musique ? Le parfum aurait-il un son ? La musique aurait-elle une odeur ? Le parfum est synonyme d’émotion et de voyage. Il puise parfois son inspiration dans la musique. Nombreuses sont les marques de niche à jouer sur cette corde sensible… L’Orchestre Parfum est une jeune marque créée par Pierre Guguen, qui se décrit lui même comme parfumeur et musicien. Après plusieurs années passées dans des grands groupes de parfumerie, Pierre se lance en 2017 dans le doux rêve qu’il caresse secrètement. Celui de lancer sa propre marque de parfum. L’élément déclencheur est une partition d’un pianiste russe du 19ème siècle trouvée au fin fond d’une librairie musicale parisienne. Pierre fait alors le tour de toutes les petites manufactures d’instruments de musique de Paris. Humant au fil de ses étapes les odeurs des matériaux utilisés, l’empreinte olfactive de ces ateliers.

Chacun de ses six parfums est lié à une émotion musicale. Flamenco Néroli nous transporte un soir d’été dans des champs de bigaradiers Citrus aurantium en Andalousie. Des notes fleuries et hesperidées laissent rapidement place à un fond plus boisé de cèdre de Virginie et cèdre d’Atlas. Rose Trombone est né suite à un concert dans un club de jazz à Harlem. Au premier rang, une femme porte une rose qui se diffuse dans l’atmosphère à chacun de ses mouvements. Cette rose fraîche et propre mute peu à peu vers un fond d’où s’exhalent des notes plus gourmandes de vieux rhum et de vanille. Une Prière d’Hiver exaucée par les notes d’un koto sert de toile de fond à Encens Asakusa. L’encens disparaît rapidement pour laisser place à une facette poudrée qui prend tout son sens avec l’iris et la violette. Thé Darbouka et Cuir Kora trouvent leur source en Afrique. Piano Santal, avec ses effluves lactés est une invitation au rêve et au sommeil. L’Orchestre Parfum, EDP, 100ml, 140€.

ATELIER MATERI, LA MARQUE MADE IN FRANCE

Un retour à la nature et au made in France se fait ressentir depuis quelques années. Atelier Materi l’a bien compris. C’est pourquoi cette toute jeune maison de parfumerie créée en septembre 2019 par Véronique le Bihan allie pour ses fragrances les belles matières sourcées dans le monde entier de manière éthique et respectueuse de l’environnement. Les packagings sont fabriqués dans sa Bretagne natale. Les parfums sentent aussi bon qu’ils sont beaux à regarder. Les flacons, très épurés, révèlent un verre teinté d’un bleu nuit profond par transparence. Les bouchons sont facettés à la main en béton, façon cabochons précieux. Un matériau qui a de quoi surprendre mais dont le toucher chaud et lisse, emporte vers une flânerie toute créative. Chaque pièce est unique. Chaque parfum est travaillé autour d’une matière première. Materi signifie d’ailleurs matière en breton. Autre particularité d’Atelier Materi, la philosophie bienveillante qui entoure la marque. Des designers aux parfumeurs, la marque valorise le travail des femmes.

La collection s’articule autour de 5 jus couvrant toutes les familles olfactives. Poivre Pomélo, un épicé hespéridé, part sur des notes de poivre Timur (ou poivre Timut). Une épice qui possède la particularité de développer des arômes d’agrumes notamment de pamplemousse. D’autres notes comme le pamplemousse et les baies roses ancrent définitivement la famille olfactive de ce jus. Le cœur fait honneur aux fleurs délicates. Angélique, pivoine et osmanthus ouvrent la porte à une facette plus féminine. Cèdre, vétiver et maté en fond donne à ce parfum un sillage tout à la fois lumineux et vibrant. Grande amatrice des bois et des notes de peau, c’est tout naturellement que Véronique a voulu pour sa collection un parfum de peau. Peau d’ambrette est un musqué boisé aux effluves bestiaux, où se mêlent tour à tour de la mandarine, l’ambrette (une de ses matières préférées), l’angélique puis des muscs du santal et de l’ambroxan. Cuir d’Iris surprend par sa facette plus florale que poudrée. L’iris – l’une des matières les plus chère de la parfumerie due aux nombreuses années qu’il faut pour révéler toutes ses qualités – se fait plus crémeux et enveloppant grâce à son mariage aux muscs cuirés et au baume du Pérou.

Cacao Porcelana est tout simplement additif. C’est une surprenante ode à la gourmandise dans ce qu’elle de plus charnelle et sensuelle. Car de prime abord, un parfum au cacao n’est pas forcément un exercice de style facile sans tomber dans un cacao excessif parfois à la limite de l’écœurant. Pourtant, Atelier Materi a réussi ce tour de force avec maestria. Les matières utilisées dans ce jus donnent une furieuse envie d’y croquer à pleine dent, comme s’il s’agissait d’un dessert aux ingrédients les plus alléchants. Cacao blanc, rhum et immortelle donne à l’envolée de cette fragrance une facette chaude et épicée que le tabac blond, le davana et le jasmin d’inde viennent fixer dans le marbre. La fève tonka du fond redonne l’aspect très gourmand mais néanmoins agréable qui était prégnant dans les premières secondes. Le patchouli et le santal lui donne sa teinte boisée.
Moins gourmand mais néanmoins opulent, Santal blond se fait boisé et oriental. Il accumule en un seul jus toutes les familles olfactives, se faisant tour à tour hespéridé, épicé, fleuri, boisé et gourmand avec sa fève tonka en fond. Atelier Materi, EDP, 100ml, 220€.

CHRISTIAN PROVENZANO, LE MAÎTRE PARFUMEUR DU MOYEN-ORIENT

Les matières premières de la parfumerie sont une véritable passion chez Christian Provenzano. Durant son enfance au Maroc, il développe et cultive sa mémoire olfactive ancrant dans son esprit toutes les caractéristiques de chaque matière. Et c’est une rencontre avec François Hénin, le patron de Jovoy, qui détermine son destin, celui de lancer sa propre marque de parfums. Sa collection possède actuellement 8 parfums très orientaux, destinés à une clientèle du Moyen-Orient. Les plus emblématiques sont Iris d’Orient et Ultimate Rose. Le premier se développe autour d’un bouquet floral et poudré en cœur, avec la rose de mai, l’iris et les feuilles de violettes, que la vanille, la fève Tonka, l’ambre et les muscs en fond viennent fixer sans tomber dans l’excès d’opulence. La Rose de la collection est quant à elle très subtile. Christian Provenzano a su l’interpréter et lui donner de la modernité qui fait souvent défaut aux parfums à la rose, vus comme des parfums désuets et surannés manquant de naturel et de délicatesse. Pourtant aujourd’hui, l’objectif premier d’un nez lorsqu’il se lance dans une rose est de s’éloigner de cette mauvaise réputation, relent insidieux et lourd des années 1980. Christian Provenzano, EDP, 100ml, 215€.

MARCELLE DORMOY, DE BELLE ENDORMIE À PARFUMS 3.0

C’est le fruit du hasard qui a amené Louise du Bessey à reprendre la marque Marcelle Dormoy. Cette jeune entrepreneuse, déjà co-fondatrice de la maison Bien Elevées qui produit du safran sur les toits de Paris, souhaitait réveiller une belle endormie et l’occasion s’est présentée de reprendre l’activité liée aux parfums de l’ancienne maison de haute-couture créée en 1927. Son idée ? Lancer des parfums, dans un format quasi 100% numérique. Autrement dit des parfums 3.0. Audacieux et modernes, ils permettent à chaque femme qui les porte de révéler sa personnalité profonde, toutes les facettes de sa féminité, qu’elle se reconnaisse dans son parfum. Les trois jus de la marque, élaborés par Karine Chevallier dans un atelier à Grasse dédié à la parfumerie d’auteur, ne sont disponibles que sur Internet ou dans certains points de vente très sélectifs de la parfumerie de niche. Sur le site, les clientes peuvent acheter le coffret-découverte pour tester sur peau les trois fragrances. Et si elles sont séduites par un des parfums, lors de l’achat le prix du coffret-découverte est déduit de la facture finale. Nacarat est un fruité gourmand construit autour d’un bouquet de fleurs colorées (freesia, œillet et glycine), de fruits rouges et de vanille. Héliodor, un fleuri vert, s’envole sur des notes hespéridées très fraîches et pétillantes pour se fixer sur une facette légèrement plus poudrée de jasmin, de rose et de thé vert. Gemma Veneris, un fruité poudré, exalte une association de fleurs (jasmin, rose, ylang-ylang) à laquelle le galbanum, le patchouli et la vanille infusent des notes plus sensuelles et discrètes que l’envolée très sucrée. Marcelle Dormoy, EDP, 50ml, 98€.

Tous les parfums sont disponibles chez Jovoy Paris, 4 rue Castiglione, 75001 Paris. Tél. : 01 40 20 06 19. www.jovoyparis.com.