Les légumes en conserve et surgelés répondent parfaitement à l’attente des consommateurs qui souhaitent diversifier leur assiette et limiter le gaspillage alimentaire. Cependant, la filière est en danger. Elle doit trouver des leviers d’actions et répondre aux nombreux défis auxquels elle est confrontée tels que le changement climatique, la hausse des coûts de production, la baisse de rendement, la concurrence étrangère.

La filière Unilet, autrement dit celle de l’interprofession des légumes en conserve et surgelés (15 principaux légumes : haricots verts, pois, carottes, épinards, choux-fleurs, salsifis, flageolets, haricots beurre, brocolis, navets, céleris branches et raves, courgettes, oignons et betteraves), serait-elle en danger ? À l’instar d’autres filières interprofessionnelles telles que le Cifog (filière des palmipèdes à foie gras) ou encore le SVFPE (Syndicats des fabricants de produits Végétaux Frais Prêts à l’Emploi), ce ne sont pas les habitudes d’achat à l’origine du mal mais entre autres des questions environnementales et économiques qui obligent la filière à mener une large réflexion et surtout à anticiper sur l’avenir pour le rendre moins sombre.

LES EFFETS DU CHANGEMENT CLIMATIQUE SUR LA FILIÈRE LÉGUMIÈRE

Première cause responsable des problèmes de la filière : le « réchauffement climatique », ou plus exactement les effets du changement climatiques, qui oblige une véritable remise en question sur les pratiques actuelles de la filière et celles sur le long terme. En 2022, les cultures de légumes ont souffert de plusieurs aléas météorologiques. Gels tardifs, grêle, vents de sable, canicule, pluies torrentielles… pour n’en citer que les principaux. Ajouté à cela un manque d’irrigation (avec les restrictions sur l’irrigation et un stress hydrique), et la croissance des légumes est modifiée, voire inexistante. En effet « pas d’eau, pas de légumes ! » martèle Jean-Claude Orhan, vice président d’Unilet et président du Cénaldi (Association des organisations des producteurs de légumes). Ces cultures, qui fonctionnent avec le rythme naturel des saisons, plutôt au printemps et en été, avec des cycles de vie très courts, sont très sensibles aux aléas climatiques. Parmi les cultures ayant vu leur production reculer en 2022, les pois et les haricots, qui représentent tout de même 80 % des surfaces de légumes cultivés pour la conserve et 60 % des volumes récoltés. Si la baisse de récolte est de -8 % pour les petits pois, il atteint -16 % pour les haricots !

LA FLAMBÉE DES COÛTS DE PRODUCTION AFFECTE LA FILIÈRE LÉGUMIÈRE

Les chaleurs de l’été 2022 ont provoqué des périodes sans récolte ou avec des récoltes diminuées. Elles ont entrainé de fait une sous-utilisation des capacités des ateliers de transformation mais aussi un surcroit de travail et du tri supplémentaire (pour écarter les légumes ne répondant pas aux cahiers des charges des entreprises comme les petits pois trop durs ou les haricots ayant trop de grains et de fils dans leurs gousses) pour garantir aux consommateurs une qualité de produits irréprochable et régulière. Si ces conséquences sont invisibles pour le consommateur, elles n’en demeurent pas moins un impact sur les coûts de production et la compétitivité des industriels, notamment face à leurs voisins Européens. Les coûts de production – autre cause de la situation difficile – ont subis une hausse exponentielle sans précédent. Les professionnels de l’agroalimentaire estiment l’augmentation du coût de l’énergie (due à la guerre en Ukraine), de l’ordre de +165 % en janvier 2023 par rapport à 2021. Les engrais ont augmenté de 75 %, le gazole non routier de 66 %, et le coût de l’emballage entre 15 % (matières plastiques) et 24 % (acier). Ces difficultés rencontrées sur le terrain provoquent un désamour des agriculteurs pour ces cultures fragiles. Par rentabilité, ils préfèrent se tourner vers d’autres, notamment les céréales – grandes rivales des légumes -, quand ils ne décident pas… de quitter le métier. Le maintien du nombre de producteurs et l’attractivité des productions auprès des agriculteurs sont des objectifs pour 2027.

PRODUITS ANTIGASPI POUR UNE ALIMENTATION SAINE ET DURABLE

Malgré les différents problèmes de la filière, les légumes n’ont jamais été aussi plébiscités par l’ensemble des français, même s’ils n’ont globalement pas réussi à atteindre le challenge de 10 portions de fruits et légumes par jour (lancé à l’initiative d’Interfel en 1999), réduit à 5 en 2007 dans le cadre d’une campagne de prophylaxie du Programme National Nutrition Santé (PNNS). En 2022, 622 millions de conserves de légumes et 286376 tonnes de légumes surgelés ont été vendus en France. De plus en plus de consommateurs se déclarent flexitariens puisqu’ils sont aujourd’hui 49 % à le faire. Le principe ? Manger moins de viande, moins souvent, mais de meilleure qualité. Ce qui oblige à modifier son alimentation et laisser une plus grande place aux fruits et légumes dans les repas où il n’y a pas de viande. Les consommateurs veulent plus que jamais des produits sains, de saison, cultivés plein champs, accessibles et durables. Les légumes en conserve et les surgelés répondent entièrement à ces doléances. Par ailleurs, ils veulent limiter le gaspillage et maîtriser leur budget. En effet, chaque année 150 kg de nourriture par personne partent à la poubelle ! Si les fruits et légumes en conserve et surgelés ont subis une hausse de prix (8 % pour les premiers et 4,5 % sur les seconds), ils sont de véritables produits antigaspi ! Les surgelés permettent de contrôler au gramme près la quantité voulue et les conserves, grâce à leur différents formats, limitent les déchets.

Et demain ? Continuerons-nous à manger des légumes en conserve ou surgelés ? Les professionnels de la filière s’engagent d’ici 2027 à réfléchir et agir ensemble autour de trois axes (environnemental, économique, social) définis dans une démarche collective intitulée « Les Légumiers de demain ». De plus, ils souhaitent contribuer activement au projet de Plan de Souveraineté Alimentaire initié par le Gouvernement lequel doit permettre à la filière, à l’aube de 2023, d’atteindre 52 % de production et transformation nationales dans la consommation française.